Si parler salaire est tabou en France, l’évoquer entre femmes l’est encore plus. Pourquoi est-il urgent de libérer la parole ?
Un article intéressant par Christelle Laffin à lire sur http://madame.lefigaro.fr/business/combien-tu-gagnes-dire-son-salaire-le-sujet-tabou-entre-femmes-en-france-051217-145858
De sa meilleure amie, on connaît le nombre d’amants inavouables, le prénom encore secret de son futur bébé ou sa pire bourde avec son N+1. Mais presque jamais le montant de ses revenus. «J’ai demandé son salaire à une amie de vingt ans, cadre, aux mêmes qualifications que moi», explique Lisa, directrice pédagogique. «Entre deux postes, je m’informais pour déterminer mes prétentions. Et elle sait combien je gagne. Elle a essayé de changer de sujet pour finalement me lâcher… une vague fourchette. Je n’ai pas insisté.» Une réaction assez –trop ? – courante. «Le tabou autour de l’argent est très français, rappelle Janine Mossuz-Lavau (1), directrice de recherche CNRS au Cevipof. Et ce, pour les femmes comme les hommes. Demander le salaire de quelqu’un est incongru. Y compris celui de ses proches.»
Les coupables ?
Nos racines paysannes et catholiques. «Avant, l’argent était caché à la maison, pas à la banque. On n’en parlait pas, pour éviter les convoitises. Et l’Église louait la pauvreté. Puis le marxisme nous a fait développer une culpabilité du profit.» Même si «on en parle plus qu’il y a vingt ou trente ans», concède-t-elle.
Et quand la psychologie entre en jeu, rien ne va plus. Craindre de révéler son salaire à une amie, pourrait éventuellement venir de «la jalousie de la fratrie», selon Chine Lanzmann, coach en leadership, auteure du Guide de l’auto-coaching pour les femmes(Éditions Pearson). «Une réminiscence de la relation avec la mère ou les sœurs. Est-ce qu’elle gagne plus ou moins que moi, est-ce qu’elle a plus l’amour de papa ou maman, plus d’argent de poche, plus d’héritage… ?» Et surtout : est-elle meilleure que moi ? D’où le blocage, souvent féminin, qui consiste à confondre valeur financière du travail accompli et valeur de la personne. «Je rappelle sans cesse la distinction à mes clientes. Leur valeur est inestimable. Seul leur travail a un prix», poursuit Chine Lanzmann. Et puis gare à la culpabilité latente, liée à des archétypes ancestraux encore bien ancrés dans l’inconscient collectif. Une «travailleuse» qui «demande de l’argent» a longtemps désigné… une prostituée, par opposition à celle qui s’occupe de la maison et des enfants. Être fière de ses revenus, pouvoir les révéler demande de se détacher de ces freins.
Oser enfin parler d’argent
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